Qu'est-ce que le "Act your wage", le phénomène qui enflamme les jeunes diplômés dans les entreprises ?
Rage applying, conscious quitting, career cushioning et maintenant le "act your wage"... De nombreux phénomènes où les salariés souhaitent montrer leur mécontentement à leurs employeurs émergent ces dernières années.
La "démission silencieuse" (ou "quiet quitting") est l'un de ceux qui a le plus retenu l'attention dans le débat public : "Au lieu de soumettre une lettre de démission ou de discuter ouvertement de leur départ, les employés démissionnent discrètement en ralentissant leur travail, en évitant les responsabilités, ou en s'absentant fréquemment. Ce comportement peut durer un certain temps avant que l'employé quitte finalement son poste", explique Claire Vallaeys, ingénieur pédagogique chez AssessFirst, auprès d'IBTimes France.
Perte de productivité, désorganisation, coûts de remplacement... Selon elle, la "démission silencieuse" peut être problématique, du point de vue des employeurs, pour de nombreuses raisons. Et ce phénomène est loin d'être derrière eux : À la fin de l'année dernière, 37% des Français actifs estimaient être proches du "quiet quitting", selon une étude de l'Ifop.
"Agir selon son salaire" : une autre tendance identifiée
La même enquête montre qu'un certain déclin graduel de l'engagement des salariés semble être attribuable à une perception déplaisante selon laquelle l'effort investi dans une entreprise ne se traduit jamais par des bénéfices équitables. Le pourcentage de travailleurs français ressentant qu'ils donnent plus qu'ils ne reçoivent de leur travail a presque doublé au cours des trois dernières décennies (48 % contre 25 % en 1993).
Ainsi, plus d'un tiers des travailleurs en France s'identifient désormais à cette philosophie consistant à respecter strictement les termes de leur contrat de travail en déclinant les heures supplémentaires et les tâches qui ne sont pas explicitement liées à leurs responsabilités. C'est ce qui est appelé, dans le secteur des ressources humaines, le phénomène "Act your wage" ("agir selon son salaire").
Celui-ci est né sur les réseaux sociaux - avec le hashtag #actyourwage - et comptabilise aujourd'hui plus de 300 millions de vues dans le monde sur le réseau social TikTok.
Quelles sont les raisons de l'émergence de cette nouvelle tendance ?
"Les revendications sont plurielles. D'une part cela touche à l'équilibre vie professionnelle et vie personnelle. L'idée est de poser des limites dans la sphère professionnelle pour lutter contre une trop forte charge de travail. Ensuite, cela touche au salaire : le but est de rétablir une 'justice', c'est-à-dire d'obtenir une revalorisation de salaire vis-à-vis de l'engagement accordé", analyse Claire Vallaeys.
Et ce phénomène concerne surtout les jeunes générations, qui portent pourtant moins d'importance à la rémunération que leurs aînés. En effet, chez les 18-24 ans, ils sont seulement 34 % à considérer ce critère comme étant le plus important pour leur orientation professionnelle, soit 21 % de moins par rapport à la moyenne, comme le montre le dernier baromètre de la marque employeur publié par Welcome to the Jungle.
En revanche, l'ingénieure pédagogique identifie trois principales raisons à cette tendance : "Premièrement, les employeurs attendent souvent des jeunes générations qu'elles pallient leur manque d'expérience en s'investissant encore plus dans leur vie professionnelle.
Deuxièmement, l'équilibre professionnel/personnel est fondamental pour les jeunes : D'après une enquête menée par DomPlus Group en 2019, il est indispensable pour 88 % des moins de 35 ans d'établir une frontière entre vie personnelle et vie professionnelle.
Enfin, la dernière raison concerne le canal de communication utilisé : ici les réseaux sociaux", affirme-t-elle. Effectivement, près de la moitié (47 %) des utilisateurs de ces plateformes sociales ont moins de 29 ans.
Comment limiter ces phénomènes ?
Plusieurs instruments s'offrent alors aux employeurs pour éviter la multiplication de ces différentes expressions de mécontentement des salariés. Tout d'abord, la transparence des salaires semble représenter, aux dires de Claire Vallaeys, une piste pertinente : "Cette transparence est demandée par les Français comme le prouve une enquête publiée par talent.com à la fin de l'année 2022. 64 % des français déclarent se sentir à l'aise avec l'idée de communiquer leur niveau de salaire à leurs collègues.Cette transparence aiderait de plus à réduire les inégalités salariales, entre les générations, mais également entre les hommes et les femmes".
Parallèlement, respecter davantage l'équilibre personnel et professionnel des collaborateurs en n'envisageant aucune sanction, mais plutôt en valorisant les salariés plus impliqués est également suggéré par l'ingénieure pédagogique. Enfin, il est nécessaire de repenser l'engagement des collaborateurs : "Le phénomène Act your Wage insiste sur le rapport contractuel existant entre le salarié et l'employeur. Mais au-delà d'une fiche de poste ou d'un salaire, d'autres liens immatériels peuvent garantir un épanouissement professionnel. Ces liens notamment de loyauté sont à réinventer au cœur des directions RH", soutient Claire Vallaeys.
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