Pour Gabriel Attal, "Nous avons un Smic nettement supérieur à celui de nos voisins !" Est-ce réellement le cas ?

Le Premier ministre Gabriel Attal était attendu hier au Palais Bourbon pour prononcer son discours de politique générale. Comme le président de la République lors de sa conférence de presse, mi-janvier, au Palais de l'Élysée, le chef du gouvernement - qui n'est toujours pas encore complet - a profité de ce moment solennel pour... muscler son bras droit ! Simplification et suppression de normes, revalorisation du travail, baisse des charges, réaffirmation de l'autorité, responsabilisation des patients... Le "en-même temps" macronien serait-il de l'histoire ancienne ?

Une autre phrase choc est à retenir du discours de Gabriel Attal : "Il faut désmicardiser la France". Cela a suscité de vives réactions chez les syndicats - qui craignaient que cette formulation sous-entende la suppression du salaire minimum en France - avant que la ministre du Travail, Catherine Vautrin, exclut définitivement cette hypothèse, au micro de RMC/BFMTV, ce mercredi 31 janvier.

Cette formulation fait plutôt référence à la volonté de diminuer le nombre de salariés français rémunérés au Smic : 17,3 % des travailleurs hexagonaux percevaient le salaire minimum en 2023, selon les données d'un groupe d'experts sur le Smic. Cela représente 3,1 millions de personnes. C'est un record absolu dans l'histoire du pays ! En seulement deux années, ce taux a grimpé de plus de 5 points (ils n'étaient que 12 % en 2021).

La revalorisation du Smic - qui atteint désormais 1 398,69 euros net par mois pour un 35 heures hebdomadaires - est en grande partie à l'origine de ce phénomène. Justement, dans son discours, le locataire de Matignon a estimé que nous avions "un Smic nettement supérieur à celui de nos voisins". Est-ce réellement le cas ? Pas vraiment...

L'Allemagne, la Belgique... Un salaire minimum proche des 2 000 euros par mois

Selon les données d'Eurostat, l'organisme chargé de l'information statistique rattaché à la Commission européenne, cinq États membres présentent un salaire minimum supérieur à celui de la France (chiffres du S2 de l'année 2023). Tout en haut du classement, figure le Luxembourg avec une rémunération ne pouvant être inférieure à 2 508 euros brut par mois. Ensuite, l'Allemagne (1 997 euros), les Pays-Bas (1 995 euros), la Belgique (1 955 euros) et l'Irlande (1 909 euros) font également partie du Top 5 des pays de l'UE qui payent le mieux leurs travailleurs.

La France et son Smic fixé, au 1er janvier 2024, à 1 766,92 euros ne figure donc qu'à la sixième place de ce classement. Nous sommes loin de ce que prétend Gabriel Attal. Et en prenant également en compte les pays voisins qui n'appartiennent pas à l'Union européenne, ce constat s'intensifie : dès avril, le salaire minimal au Royaume-Uni passera de 10,42 à 11 livres sterling par heure (soit 12,88 euros). En France, le Smic horaire brut atteint 11,65 euros. Il en va évidemment de même avec la Suisse et son son salaire minimum qui dépasse les 4 000 euros par mois !

En revanche, il est exact que le pays des Lumières propose un "Smic nettement supérieur" à celui de l'Espagne (1 260 euros brut par mois) ou encore du Portugal (886 euros). Pour d'autres États membres - comme l'Italie ou le Danemark - il n'existe pas d'équivalent du Smic français. C'est d'ailleurs le cas pour cinq pays de l'UE. Sixième sur vingt-deux : voilà donc la vraie place de la France. Le Premier ministre Gabriel Attal s'est peut-être un peu emballé...