UBS est attaquée pour ce qui semble désormais être un accord de faveur après avoir été poussée par les autorités suisses à racheter le Crédit Suisse, mais les experts préviennent que le chagrin pourrait survenir si l'entreprise ne parvient pas à se re
UBS est attaquée pour ce qui semble désormais être un accord de faveur après avoir été poussée par les autorités suisses à racheter le Crédit Suisse, mais les experts préviennent que le chagrin pourrait survenir si l'entreprise ne parvient pas à se restructurer et à endiguer les pertes. AFP

Le géant bancaire UBS a-t-il conclu "l'affaire du siècle" en rachetant pour une somme dérisoire l'une des plus grandes banques du monde alors qu'elle était au bord du gouffre ?

En mars, la plus grande banque suisse a été fortement armée par les autorités suisses pour racheter le Crédit Suisse pour 3,25 milliards de dollars, afin d'empêcher son plus proche rival national de faire faillite.

À l'époque, les investisseurs étaient stupéfaits par les risques qu'UBS prenait avec cet achat.

Mais en août, la banque a déclaré qu'elle n'aurait pas besoin des milliards de dollars de soutien offerts par le gouvernement suisse et la banque centrale pour compenser les surprises qui pourraient surgir dans les comptes de son rival en difficulté.

Cela doit signifier que la situation du Credit Suisse était "bien meilleure que celle décrite en mars", a écrit Thomas Aeschi, député de l'UDC populiste de droite, sur X, anciennement Twitter.

UBS a semblé lui donner raison en dévoilant ses résultats du deuxième trimestre, le 31 août.

La banque a enregistré un bénéfice net colossal de 29,2 milliards de dollars sur trois mois, grâce à un gain exceptionnel dû à l'écart entre le montant payé pour le Crédit Suisse et sa valeur comptable.

"UBS a réussi l'affaire du siècle", a déclaré le Parti socialiste suisse, affirmant que le "sauvetage" était plutôt une "aubaine", lui permettant de racheter une banque à un taux considérablement réduit.

"Si nous avions choisi une autre voie, comme une nationalisation temporaire ou partielle", a déclaré Samuel Bendahan, député socialiste et professeur d'économie à l'Université de Lausanne, l'Etat suisse "aurait pris le risque, mais ces 29 milliards de dollars sont allés à la population".

Au lieu de cela, le rachat a créé "une situation monopolistique", a-t-il déclaré à l'AFP, avertissant que même si cela pourrait renforcer UBS, cela placerait la Suisse dans une position extrêmement risquée si la nouvelle méga-banque devait un jour faire face à une crise.

Les politiques ne sont pas les seuls à s'opposer à cette prise de pouvoir.

Gisele Vlietstra, fondatrice de l'Association suisse pour la protection des investisseurs, a déclaré à la chaîne publique RTS que l'énorme bénéfice trimestriel de l'UBS confirme que la "valeur intrinsèque" du Crédit Suisse était "bien supérieure" au prix d'achat.

Elle a dit espérer que les poursuites intentées par son association et d'autres au nom de milliers d'actionnaires du Crédit Suisse aideront à déterminer "la valeur correcte" à laquelle ils devraient être indemnisés.

"UBS a payé cher" et "s'est débarrassée de son principal concurrent" d'un seul coup, a déclaré à l'AFP Carlo Lombardini, avocat et professeur de droit bancaire à l'Université de Lausanne.

La restructuration à venir comporte évidemment des risques, "mais après avoir payé seulement trois milliards, elle ne peut pas se tromper", a-t-il déclaré, fustigeant l'option choisie par les autorités suisses.

Comme l'UBS, le Crédit Suisse figurait parmi les 30 banques internationales jugées trop grandes pour faire faillite en raison de leur importance dans l'architecture bancaire mondiale.

Mais la faillite de trois prêteurs régionaux américains en mars a fait de l'entreprise le prochain maillon faible de la chaîne.

Le gouvernement suisse craignait que le Crédit Suisse ne fasse rapidement défaut et ne déclenche une crise mondiale, mettant en péril la réputation de la Suisse en matière de banque solide.

Mais l'option choisie pour résoudre ce problème a certainement été une aubaine pour UBS, qui va désormais s'agrandir pour gérer 5 000 milliards de dollars d'actifs investis.

Le président de l'UBS, Sergio Ermotti, a reconnu dans une récente interview à l'hebdomadaire SonntagsZeitung que la banque était "inquiète" depuis 2016 pour son concurrent et qu'elle avait notamment étudié la possibilité de l'acquérir, de peur qu'un prêteur étranger ne s'en empare.

Il a reconnu que le Crédit Suisse aurait peut-être survécu pendant un certain temps si la banque centrale avait injecté davantage de liquidités, "mais cela n'aurait pas suffi, car la confiance s'est évaporée".

Depuis l'annonce du rachat en mars, le cours de l'action d'UBS a grimpé de 31 pour cent.

Mais la banque reste confrontée à des défis importants, a déclaré à l'AFP Andreas Venditti, analyste chez Vontobel.

Les 29 milliards de dollars " constituent un énorme gain ponctuel, mais ce n'est qu'une question de comptabilité ", a-t-il déclaré, soulignant que " les pertes et les coûts viendront plus tard ".

L'analyste, qui se demandait il y a quelques mois dans une note si UBS avait obtenu "l'accord de la décennie ou une décennie de maux de tête", a souligné que "cela va être une tâche énorme".

Il a ajouté que "si cela en valait la peine" ne deviendra clair qu'une fois que l'essentiel de la restructuration aura été réalisé, trois ans plus tard.

Certaines parties de l'entreprise continuent de "produire d'énormes pertes", a-t-il déclaré, avertissant que "beaucoup de choses peuvent encore mal tourner".

L'analyste de Swissquote, Ipek Ozkardeskaya, est du même avis, rappelant que "UBS a été forcée" de participer à la fusion.

Il appartient désormais à la banque de " transformer une " obligation " à son avantage ".