Épiceries, coiffeurs, garagistes, transporteurs : Pourquoi les faillites atteignent des niveaux records ?
Dans son dernier rapport, Altarès, la société experte en données d'entreprises révèle un chiffre effrayant. Au troisième trimestre 2023, 10 979 entreprises ont fait faillite, soit une hausse de 23 %. En moyenne, 4 500 entreprises font défaut chaque mois depuis janvier. Ce sont les PME-ETI qui souffrent le plus avec 900 entreprises en difficulté et 37 000 emplois menacés, au plus haut depuis 2016. " Depuis début 2022, le nombre de défaillances augmentait en moyenne de 47 % chaque trimestre. Un taux aussi élevé sur une si longue période est inédit, mais rappelons qu'en 2021, les défauts étaient aussi au plus bas depuis 35 ans. À l'issue de ce 3ème trimestre, la hausse (de 23 %) ralentit et les prochains trimestres pourraient également connaître des augmentations plus modérées ", tempère Thierry Millon, directeur des études Altares.
Depuis le début de l'année 2023, sur une période de 9 mois glissante, la France a donc enregistré 41 000 défaillances, soit une moyenne de 4 550 défauts chaque mois. Un rythme qui nous projette aux environs des 55 000 procédures en fin d'année, après un dernier trimestre qui devrait confirmer la décélération observée cet été.
Les PME-ETI suscitent toutefois une attention particulière. Très fragilisées dès 2022, elles représentent désormais 8,2 % des défauts. C'est 2 % de plus qu'en été 2019 et c'est aussi le taux le plus élevé depuis la crise financière.
Les très jeunes entreprises, celles de moins de 3 ans, sont les plus vulnérables. Près de 1 700 sociétés créées depuis 2021 sont tombées en défaillance ce 3e trimestre, c'est 32% de plus qu'il y a un an.
À l'inverse, les jeunes entreprises (entre 5 et 3 ans) créées avant Covid et qui ont su résister jusqu'alors, tiennent bon. 3 175 ont fait défaut, c'est " seulement " 13% de plus qu'un an plus tôt. Cette performance s'accompagne également de meilleures perspectives de rebond, puisque le nombre de liquidations judiciaires n'augmente que de 9 % à la faveur de redressements judiciaires en hausse de 24 %.
Dans le détail des secteurs économiques, la construction tente de résister, mais le commerce est en souffrance.
Dans la restauration, 1 207 restaurants ont baissé le rideau (+21 %) au cours de ce 3e trimestre, un nombre proche de celui de l'été 2018 (1 242). Cette tendance est portée par la restauration rapide qui signe un " record " historique avec 532 défauts (+28 %), tandis que la restauration à table (625) est à peine à son niveau de défaillance de l'été 2019 (634). Les débits de boisson enregistrent une dégradation rapide (234 ; + 30 %) mais demeurent sous le niveau de 2019 (242).
Dans le commerce, le nombre de fermetures reste dans la moyenne globale et reste proche de son niveau en 2019, à la faveur des magasins d'habillement qui tiennent (+26 % ; 203 vs 230 en 2019), malgré les défauts de plusieurs enseignes renommées. L'équipement du foyer (+23 % ; 203 vs 218 en 2019) est également sous ses valeurs d'avant Covid, mais la situation est tendue pour l'activité meuble. En revanche, le trimestre est resté compliqué pour les épiceries qui souffrent de la concurrence de la grande distribution, plus compétitive en période de forte inflation.
Dans le secteur des services, c'est l'hécatombe. Les activités de coiffure et instituts de beauté (+38 % ; 401) connaissent une sinistralité au plus haut sur dix ans. Depuis le début de l'année, on comptabilise près de 1 090 défauts de coiffeurs, soit autant que sur l'ensemble de l'année 2015, qui détenait la triste place de " pire " année sur le front des défaillances pour le secteur.
La construction, qui a longtemps résisté, enregistre désormais une tendance supérieure à la moyenne globale et renoue avec les seuils pré Covid. Le nombre de défaillances d'agences immobilières a quasiment doublé ce 3e trimestre (+98 % ; 172), au plus haut depuis plus de 10 ans.
Les défaillances d'entreprises en agroalimentaire (+22 % ; 361) se concentrent principalement dans les activités de boulangerie-pâtisserie et pâtes (269 ; +16 %).
La hausse des défaillances reste forte dans les services aux entreprises (1 472 ; +34 %), en particulier dans le conseil en communication et gestion (+51%) et le nettoyage de bâtiments (+41%). Dans les services informatiques (+33% ; 236), la situation est particulièrement délicate dans les activités de programmation, qui connaissent leur plus haut niveau de défauts sur plus de 10 ans.
Avec 277 défaillances d'entreprises, le transport routier de marchandises (+20 %) présente une sinistralité jamais atteinte depuis plus de dix ans dans l'interurbain et au plus haut depuis 2015 pour le fret de proximité.
L'agriculture se distingue avec un recul des faillites (-5 %), particulièrement marqué dans l'élevage (-28 %). La situation est plus délicate dans les activités de soutien aux cultures et la culture de la vigne.
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