Life2Vec : Cette IA danoise prédit-elle vraiment la mort ?
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Prédire la mort. Voilà un vieux fantasme qui divise : doit-on connaître notre destinée ? Cette idée presque philosophique inspire régulièrement les réalisateurs de fictions, comme Prédictions avec Nicolas Cage, Don't Look Up avec Leonardo DiCaprio ou le film d'horreur Countdown. Tout cela reste évidemment fictif. Et pourtant, une intelligence artificielle récemment développée au Danemark serait bel et bien capable de prédire les conditions du décès d'une personne.

Nommée Life2Vec, celle-ci puise sa source à partir de nombreuses recherches réalisées par des scientifiques danois et américains. Des millions de données personnelles relatives à six millions Danois ont été recueillies. Situation économique et sociale, état de santé, type d'emploi, avantages sociaux... Tous les éléments pertinents à cet effet ont été analysés.

Une prédiction correcte dans près de 8 cas sur 10

Et le résultat est tout particulièrement impressionnant : Une étude, publiée au milieu du mois de décembre dans la revue Nature Computational Science, révèle que cette IA révolutionnaire prophétise correctement la mort dans 78,8 % des cas. Pour cette expérience, 100 000 personnes âgées de 35 à 67 ans ont été étudiées entre 2008 et 2016, parmi lesquelles la moitié est décédée dans les quatre années qui suivirent la récolte des données.

Plusieurs phénomènes assez évidents ont ainsi été constatés. Tout d'abord, comme nous pouvions l'imaginer, les Danois ayant les revenus les plus faibles sont davantage enclins à décéder plus jeunes que les autres. De même, les personnes présentant des diagnostics psychiatriques préoccupants ont été associées à un risque de décès plus prématuré.

"Ce qui est passionnant, c'est de considérer la vie humaine comme une longue séquence d'événements, de la même manière qu'une phrase dans une langue est constituée d'une série de mots. C'est généralement le type de tâche pour laquelle les modèles de transformateur en IA sont utilisés, mais dans nos expériences nous les utilisons pour analyser ce que nous appelons des séquences de vie, c'est-à-dire des événements qui se sont produits dans la vie humaine", affirme Sune Lehmann, l'un des chercheurs ayant participé à l'étude.

Une IA dangereuse pour la société ?

En parallèle de l'aspect innovant que revêt Life2Vec, un sérieux enjeu lié à l'éthique est aussi soulevé. En effet, l'exploitation des données médicales sensibles peuvent porter préjudice à la dimension de confidentialité. De plus, cette intelligence artificielle peut tomber dans de mauvaises mains, comme celles des compagnies d'assurance, qui pourraient profiter de cette innovation pour estimer l'espérance de vie de leurs clients, et ainsi davantage se remplir les poches (au détriment des assurés...).

Sune Lehmann estime que cela doit faire l'objet d'une évolution législative : "Le modèle ouvre d'importantes perspectives positives et négatives à discuter et à aborder politiquement. Cette discussion doit faire partie du dialogue démocratique afin que nous puissions réfléchir à la direction que prend la technologie et à la question de savoir si c'est une évolution que nous souhaitons", estime-t-il dans un communiqué.

"On veut faire prendre conscience de ce qui est possible, ça ne doit pas se faire derrière une porte fermée dans la Silicon Valley, mais publiquement, que nous puissions nous interroger sur comment légiférer", poursuit le chercheur au micro de France Inter.

De son côté, Laura Tocmacov Venchiarutti, directrice de la fondation impact IA, préfère évoquer l'opportunité d'intérêt collectif que peut représenter Life2Vec : "Ce modèle peut être utilisé pour de bonnes raisons : prévoir les problèmes de santé ou sociaux rencontrés par un individu, ou mettre en place des actions pour réduire les inégalités touchant un groupe", explique-t-elle au Parisien.

Selon les chercheurs, la prochaine étape sera d'intégrer à la base de données de Life2Vec d'autres types d'informations, comme du texte, des images ou des renseignement sur les liens sociaux, ouvrant ainsi une toute nouvelle interaction entre les sciences sociales et la santé. Peu d'obstacles semblent se présenter devant la route du développement de l'intelligence artificielle !