Le chef de la Banque centrale du Liban snobe les enquêteurs européens
Le gouverneur de la banque centrale libanaise Riad Salameh, sous le feu des critiques, ne s'est pas présenté mercredi devant les enquêteurs européens, son équipe juridique affirmant que l'audience aurait été "en conflit avec la souveraineté nationale", a déclaré une source judiciaire.
Salameh, 72 ans, fait partie de la classe politique libanaise largement blâmée pour une crise économique écrasante qui a débuté fin 2019 et que la Banque mondiale a qualifiée de l'une des pires de l'histoire récente de la planète.
Il fait face à des accusations de détournement de fonds présumés dans des enquêtes distinctes au Liban et à l'étranger, les enquêteurs examinant la fortune qu'il a amassée au cours de ses trois décennies de travail. Il nie toutes les allégations.
Salameh avait été convoqué mercredi matin au palais de justice de Beyrouth mais s'est opposé à l'audience et a plutôt envoyé un représentant légal, a déclaré à l'AFP le responsable judiciaire sous couvert d'anonymat car ils ne sont pas autorisés à parler aux médias.
L'objection a accusé que "la présence de juges internationaux au Liban et l'enquête sur les questions financières sont en conflit avec la souveraineté nationale", a ajouté le responsable.
La justice libanaise a rejeté mercredi la demande, estimant que la présence de l'équipe internationale "n'est pas contraire au droit libanais et porte atteinte à la souveraineté libanaise", selon le responsable.
La séance a été reportée et le juge libanais Charbel Abu Samra a plutôt convoqué Salameh à comparaître jeudi à 10h30 (08h30 GMT), a ajouté le responsable.
La France, l'Allemagne et le Luxembourg ont saisi en mars de l'année dernière des actifs d'une valeur de 120 millions d'euros (130 millions de dollars) dans le cadre d'une enquête française sur la fortune personnelle de Salameh.
L'enquête européenne enquête sur des soupçons d'inconduite financière, y compris d'éventuels blanchiments d'argent et détournements de fonds.
La délégation a soumis une centaine de questions au juge Abou Samra qui, pour des raisons de procédure, procéderait à l'interrogatoire en présence d'officiels européens, a indiqué à l'AFP une deuxième source judiciaire.
Salameh apparaîtrait "en tant que témoin" et ne serait ni inculpé ni arrêté, a déclaré le deuxième responsable, ajoutant que le chef de la banque centrale pourrait faire face à plusieurs jours d'interrogatoire.
En janvier, les enquêteurs européens ont interrogé des responsables bancaires à Beyrouth sur le transfert de fonds vers des pays où Salameh possède des actifs importants.
Ils ont également examiné les liens de la banque centrale avec Forry Associates Ltd, une société enregistrée aux îles Vierges britanniques qui a inscrit le frère de Salameh comme bénéficiaire.
Forry est soupçonné d'avoir négocié des bons du Trésor libanais et des euro-obligations auprès d'une commission, qui auraient ensuite été transférés sur des comptes bancaires à l'étranger.
Salameh a rarement comparu devant la justice, malgré de nombreuses plaintes et convocations.
Le mois dernier, les autorités libanaises ont accusé Salameh de détournement de fonds, de blanchiment d'argent et d'évasion fiscale dans le cadre d'une enquête locale.
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