L'Europe veut autoriser le glyphosate pendant 10 ans
La Commission européenne a proposé mercredi de renouveler pour 10 ans l'utilisation de l'herbicide controversé et largement utilisé dans l'UE, le glyphosate, après qu'un rapport n'ait vu aucune raison de le bloquer.
Le glyphosate est l'un des désherbants les plus utilisés au monde, mais les critiques pointent du doigt des preuves selon lesquelles il pourrait provoquer le cancer et constituerait un risque pour la biodiversité.
Les 27 États membres de l'Union européenne discuteront de la proposition vendredi. Il doit être approuvé par une majorité pondérée des pays lors d'une réunion le 13 octobre.
Cette proposition intervient après que l'Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a déclaré en juillet qu'elle n'avait trouvé " aucun sujet de préoccupation critique " empêchant la réautorisation du glyphosate, déclenchant une réaction négative de la part des groupes environnementaux.
Les militants écologistes ont déclaré qu'il existait des preuves scientifiques selon lesquelles le glyphosate pouvait provoquer le cancer, empoisonner la vie aquatique et être mortel pour les principaux pollinisateurs comme les abeilles.
La précédente autorisation avait expiré en décembre 2022 mais a été prolongée d'un an dans l'attente d'une étude scientifique de l'herbicide.
La proposition autoriserait son utilisation jusqu'au 15 décembre 2033, soit le double de la précédente autorisation de cinq ans mais moins que la période de 15 ans initialement prévue.
L'autorisation peut être retirée si un développement justifie un changement de position.
Les défenseurs de l'environnement ont accusé l'UE de mettre en danger la santé des citoyens.
"Les intérêts de l'industrie prévalent clairement sur la santé et l'environnement", a déclaré Angeliki Lysimachou, responsable scientifique et politique du groupe écologiste PAN Europe.
Les membres du Parlement européen ont également critiqué ces projets.
"En détruisant la biodiversité, le glyphosate met en danger notre sécurité alimentaire à long terme. Cette proposition est irresponsable", a déclaré l'eurodéputé Vert Benoit Biteau.
Mais l'Agence européenne des produits chimiques a déclaré l'année dernière que les preuves scientifiques ne justifiaient pas la classification du glyphosate comme cancérigène.
La proposition de la commission indique que l'utilisation du glyphosate doit être accompagnée de " mesures d'atténuation des risques ".
Par exemple, il doit y avoir une " bande tampon non pulvérisée " de cinq à 10 mètres (16 à 33 pieds) dans un champ et un équipement utilisé pour réduire considérablement la " dérive de pulvérisation ".
Le rapport de l'EFSA a noté qu'il y avait des lacunes dans les données dans certains domaines et "a identifié un risque élevé à long terme pour les mammifères" dans 12 des 23 utilisations proposées du glyphosate.
Pour résoudre ce problème, la commission a exhorté les États membres, chargés de délivrer les permis au niveau national et de fixer les conditions d'utilisation, à " accorder une attention particulière " aux effets sur l'environnement.
Les pays doivent " prêter attention " à l'impact sur les petits mammifères et déterminer s'il est " nécessaire " d'imposer des mesures d'atténuation comme la limitation du moment d'utilisation ou le débit de dose maximal.
Le texte interdit également désormais l'utilisation du glyphosate pour la dessiccation, c'est-à-dire le séchage d'une culture avant la récolte.
Pascal Canfin, président de la commission parlementaire de l'environnement, a critiqué l'absence de restrictions d'utilisation dans la proposition "inacceptable" qui n'est "pas conforme aux conclusions de l'EFSA".
Le Luxembourg avait interdit le glyphosate en 2020 avant que les tribunaux ne l'obligent à lever l'interdiction plus tôt cette année.
Cette proposition intervient alors que le Parlement et les États membres s'enlisent dans les négociations en faveur d'une loi imposant des objectifs contraignants de réduction des pesticides dans l'UE.
© Copyright AFP 2024. All rights reserved.