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AFP

Le Conseil d'Etat annule la non-rétroactivité de la loi de finances pour les meublés de tourisme : véritable changement ou décision symbolique ? Analyse de Baptiste Bochart, spécialiste en Fiscalité de la Location Meublée.

La question, en suspens depuis l'entrée en vigueur de la loi de finances 2024, de l'applicabilité de ses dispositions fiscales concernant la location de meublés de tourisme pour les revenus 2023 déclarés en 2024, vient enfin d'être définitivement réglée par un arrêt du conseil d'Etat en date du 8 juillet 2024, et il s'agit d'un nouveau retournement de situation pour les loueurs de meublés de tourisme.

Depuis son adoption, l'application rétroactive des dispositions de la loi de finances aux revenus générés par les loueurs de meublés de tourisme en 2023 générait de nombreuses craintes pour les concernés, en raison des importantes réductions concernant le régime fiscal dit " micro-BIC " prévues par la loi.

À tel point que le gouvernement avait rapidement annoncé vouloir se pencher sur cette mesure.

Après plus d'un mois d'attente, cette annonce avait été suivie d'effets, puisque le 14 février
dernier un article du BOFiP (Bulletin Officiel des Finances Publiques) prévoyait de laisser le choix aux loueurs concernés de se voir appliquer les seuils et abattements prévus par la loi de finances 2024, ou de bénéficier, une dernière fois, des anciens seuils et abattements, bien plus favorables.

S'il avait été accueilli favorablement par les loueurs de meublés de tourisme, le répit avait été de courte durée, puisque la publication de cet article avait immédiatement été suivie d'un recours en référé pour " excès de pouvoir " déposé le 6 mars par plusieurs sénateurs.

Ces derniers ont été rapidement rejoints, le 14 mars, par l'Association pour un tourisme
professionnel, l'Union des métiers et des industries de l'hôtellerie et le Groupement des
hôtelleries et restaurations de France, faisant alors resurgir les craintes des contribuables.
Craintes légitimes, puisque l'application des mesures de la loi de finances 2024 signifie une
augmentation minimum de 40% de l'imposition des loueurs de meublés de tourisme.

Or, le Conseil d'Etat, qui avait préalablement rejeté la demande de suspension de l'article le 18 mars dernier, a accueilli les prétentions des demandeurs, venant ainsi remettre en cause la position du gouvernement. Toutefois, que les contribuables se rassurent, car le calendrier joue ici un rôle crucial : cette décision n'étant pas rétroactive, elle ne doit nullement inquiéter les contribuables car ils ont déjà réalisé leur déclaration de revenus 2023.

Si, dans le camp des opposants à l'article du BoFiP, l'heure est à la satisfaction, le statu quo reste en réalité le même pour les contribuables. En effet, la déclaration des revenus 2023 étant passée, les conséquences ne se feront nullement ressentir. De plus, d'ici à la prochaine déclaration de revenus, une nouvelle loi de finances aura vu le jour, dont la rédaction sera certainement moins sujette à interprétation.

Quant à son contenu, il semble que les loueurs de meublés de tourisme, et ce qu'ils soient classés ou non, doivent réellement se préparer à un changement important en termes de fiscalité au régime micro-BIC.

Bien que sans conséquences pour l'imposition des revenus 2023, il faut néanmoins noter que cette décision va également dans le sens de la consécration de la rétroactivité d'une loi de finances, même moins favorable aux contribuables, donnée qu'il faudra garder à l'esprit pour la prochaine loi de finances.